Je ne suis qu'un sale fraudeur !
Comme je ne peux pas trop en montrer sur Lupin, voici un dessin pour Fakir, pour un article qui n'est pas sorti dans le dernier numéro par manque de place. Affaire à suivre sur leur site ou dans le prochain numéro papier.
Je ne dévoilerai rien de l'article qui parle d'une "fraudeuse".
Mais plutôt de mon rapport à ce dessin. Car je suis un fraudeur.
Face à tous ces élus qui se goinfrent sur notre dos et se vautrent littéralement en nous faisant la morale, comme Picsou prenant des bains de pognon devant son neveu Donald en l'utilisant, le méprisant, l'insultant, je me sens comme un pauvre type qui vole son prochain.
Très clairement, je ne m'en suis jamais voulu de toucher de maigres et rares aides sociales, et je n'ai jamais triché. Même si j'ai subi deux contrôles sociaux chaque année pendant des années, et à l'usure, j'ai arrêté de demandé des aides, tant pis.
Le dessin montre quelqu'un qui se condamne, qui se considère comme une fraudeuse, vous lirez l'article, vous comprendrez.
Pour ma part, c'est au niveau des soins que ça se passe : je fais partie de ceux qui ne vont pas chez le médecin, du moins, le plus rarement possible.
Clairement, je fais partie des précaires. Et en particulier ceux qui n'y vont que lorsque le temps n'a pas été un pansement efficace. On se dit toujours "ça va passer", ou "je serai content d'y aller le jour où ça sera grave", "Si j'y vais là, on me reprochera que ce ne soit qu'une grippette, alors le jour où il y aura un "vrai" besoin, j'aurai "épuisé" mon quota de soins disponibles" ".
Cette peur est irraisonnée et il existe des toubibs qui la combattent. Finalement, cette autoflagellation sociale (quelque soit son nom) n'est pas apparue dans les consciences par hasard. Il y a un long travail de sape systémique : on entend depuis tellement longtemps dire à la télé que les chômeurs ne veulent pas travailler, les assités coûtent cher, les roumains sont des voleurs etc... Mais il y a pire.
Il y a un système de pensée enseigné, impregné dans nos esprits comme quoi la pauvreté est presque méritée : a-t-on vraiment tout donné pour éviter d'y sombrer ? A-t-on assez bossé à l'école ? N'as-t-on pas honte de "coûter" à ceux qui bossent ? Ceci est un venin que l'on retrouve dans le système éducatif puisqu'il y a des premiers et des "tocards". Mais là encore, il y a pire.
Le coupable, c'est aussi nous tous, à chaque fois que l'on se laisse aller à croire que l'autre ne fait pas assez d'effort contrairement à soi, que l'on n'est pas responsable, qu'on fait ce que l'on peut. Alors le soir, c'est normal de se reposer et tant pis pour les autres, ils n'ont qu'à se bouger : feront-ils quelque chose pour moi ?
Non, les précaires ne sont pas coupables, ils ne sont qu'une marge nécessaire pour faire peur à la grande majorité, peur largement confortées par et pour un sytème dirigé par quelques uns, dont le venin a pour but de paralyser cette grande majorité.
Cependant, il y a aussi ceux qui tendent la main : je parlais des toubibs, il y a aussi des profs (puisque j'ai abordé le corps enseignant), mais aussi des gens de peu qui combattent les idées reçues, et l'autoflagellation. Au final, ils sont assez rares, mais ce sont des héros. Merci à eux, ce sont des modèles.